Le Livre des mutations — le Yi-king — est un livre oraculaire dont les premiers textes remontent au VIIe siècle av. J.-C. Vers le IVe siècle av. J.-C. apparaît un concept supplémentaire avec l’introduction du yin et du yang. Lorsque la tradition chinoise affecte des couleurs à ces principes complémentaires, c’est l’orange pour le yin et le bleu azur pour le yang. Nous proposons ici les huit combinaisons fondamentales du Yi-king dans une interprétation chromatique personnelle en leur affectant six couleurs, plus les deux extrêmes que sont le noir et le blanc. Le yang étant lié à la lumière, le blanc est formulé par la combinaison 1-1-1; le noir par le trigramme 0-0-0. Les huit trigrammes de base donnent aussi la possibilité de construire un carré magique où toutes les lignes passant par le centre donnent la somme 7. (Texte détaillé)
Le Livre des mutations — le Yi-king ou Yijing— est un ancien livre oraculaire dont les premiers textes remontent au VIIe ou VIe siècle av. J.-C. Selon toute vraisemblance, cet ouvrage a pour bases quatre formes différentes de prédiction. La première appuie ses déclarations sur des interprétations et des prophéties propres au monde paysan. La seconde rappelle l’expérience de ce que nous appelions, enfants, le «tirage à la courte paille»: des brindilles d’inégale longueur sont cachées dans la main, de façon à ce que la personne qui doit tirer n’en aperçoive que les extrémités, toutes semblables, et non la taille. Les symboles formés à l’aide des éléments tirés comportent des brindilles courtes et d’autres longues, qui déterminent quels symboles peuvent être constitués. La troisième forme repose sur l’interprétation des signes que l’on peut déchiffrer sur les carapaces des tortues ou sur les omoplates des mammifères, exposés au feu; la quatrième procède à partir des dés, des dominos etc.
Vers le IVe siècle av. J.-C. apparaît un concept supplémentaire avec l’introduction du yin et du yang. Si l’on essaie de rendre avec notre vocabulaire et nos catégories conceptuelles d’Occident ce que cette idée signifie dans l’univers oriental, on pourrait dire que le yin et le yang représentent les deux forces ou principes complémentaires qui constituent tous les aspects et phénomènes de la vie. Le concept de complémentarité nous intéresse aussi puisqu’il s’applique aussi aux couleurs correspondantes: le yin et le yang s’opposent et se complètent en même temps; ils agissent aussi bien l’un contre l’autre qu’ensemble. Ils ne sont ni à unir ni à séparer; les deux ensemble constituent un tout qui n’est pas fait de parties. Il n’existe pas de yin ni de yang en soi, mais uniquement yin et yang ensemble. Au yin appartiennent les catégories suivantes: terre et obscurité, féminin et passif, réceptif. Les catégories relevant du yang sont naturellement complémentaires: ciel et lumière, masculin et actif, pénétrant. Conformément à la constitution réciproque des contraires, la voyelle sourde marque le clair et réciproquement.
L’harmonie du yin et du yang, forces primitives agissant depuis l’aube de la création, est symbolisée par un cercle dans lequel une «moitié» noire et une «moitié» blanche cherchent à s’enlacer mutuellement. Le danger — qu’une force se révèle inférieure — n’existe simplement pas: chacun des deux secteurs porte depuis longtemps son contraire au centre de son arrondi. On aperçoit un petit rond noir ou blanc, et l’on comprend que l’équilibre ne sera jamais menacé.
A côté de ce couple célèbre — yin et yang sigifient textuellement le versant ombreux et le versant éclairé d’une colline — les soixante-quatre hexagrammes symboliques du Livre des mutations ont également trouvé droit de cité dans la pensée occidentale. Ils se composent de diverses combinaisons de lignes brisées ou continues, groupées par couples de trois. Ces combinaisons s’édifient et se lisent de bas en haut. Une ligne continue représente le principe masculin, positif et actif (yang), auquel on attribuera le chiffre 1; une ligne brisée représente le principe féminin, négatif et passif (yin), auquel on attribuera le chiffre O. A l’aide de ces éléments groupés par trois, on peut déterminer huit trigrammes (pa-koua) différents, chacun d’eux possédant son nom, sa signification fondamentale et sa valeur symbolique: le créatif, le réceptif, le stimulant, l’insondable, le silencieux, le doux, le résistant et le serein. La réunion de deux trigrammes donne un hexagramme et les soixante-quatre combinaisons différentes représentent soixante-quatre archétypes cosmiques, images primitives de situations fondamentales: ainsi, le trigramme du stimulant et celui du réceptif constituent l’hexagramme de l’enthousiasme. Le Yi-king possède en réserve, pour chaque hexagramme, une collection d’interprétations et de commentaires: par exemple, pour l’enthousiasme, il est dit qu’il ne doit jamais être un sentiment égoïste et qu’il est justifié uniquement s’il met en relation avec les autres.
Lorsque la tradition chinoise affecte des couleurs aux principes complémentaires (illustration), c’est l’orange pour le yin et le bleu azur pour le yang. Nous proposons ici les huit combinaisons fondamentales du Yi-king dans une interprétation chromatique personnelle en leur affectant six couleurs, plus les deux extrêmes que sont le noir et le blanc. Le yang étant lié à la lumière, le blanc est formulé par la combinaison 1-1-1; le noir, par le trigramme 0-0-0. Les six couleurs peuvent être réparties en deux groupes de trois parties chacun: les trigrammes 1-0-0 (jaune), 0-1-0 (bleu azur) et 0-0-1 (pourpre) seront les couleurs primaires; les trios 0-1-1 (violet), 1-0-1 (rouge) et 1-1-0 (vert) les couleurs secondaires.
Les huit trigrammes de base, affectés des chiffres 0 à 7, donnent aussi la possibilité de construire un carré magique., dans lequel toutes les lignes passant par le centre donnent la somme 7 — c’est-à-dire le chiffre qui est le plus fréquent dans les systèmes chromatiques.
Le cube nous offrira enfin une interprétation stéréométrique qui n’est pas exclusivement un corps géométrique, mais bien plus un modèle linguistique destiné à matérialiser le système universel de communication. Le noir y sera le silence; les couleurs primaires, le monologue; les couleurs secondaires, le dialogue; le blanc enfin, le chœur.
Datation: VIIe siècle av. J.-C.
Bibliographie: Richard Wilhelm, «I Ging Das Buch der Wandlungen», aus dem Chinesischen übertragen und erläutert, Diederichs, München 1967; Katya Walter, «Chaosforschung, I Ging und genetischer Code», Diederichs, München 1992.